
La maladie cœliaque et la sensibilité au gluten non cœliaque
Pour la plupart des gens, les aliments contenant du blé sont une source de plaisir et, lorsqu’ils sont choisis judicieusement, une source importante de nutriments essentiels tels que les fibres. Mais pour ceux qui souffrent de l’un des nombreux troubles digestifs, la consommation de cette céréale de base peut provoquer des symptômes gênants, voire dangereux, sans compter les graves problèmes de santé à long terme.
Deux de ces troubles – la maladie cœliaque et la sensibilité au gluten non cœliaque (SGNC) – semblent prendre naissance dans le système digestif, bien qu’ils puissent également affecter d’autres parties du corps. Ils seraient déclenchés par la même substance : le gluten. (Protéine présente dans le blé, l’orge et le seigle, le gluten est ce qui donne à la pâte à pain sa texture moelleuse et malléable.) Étant donné que ces deux affections peuvent provoquer des symptômes similaires à ceux du syndrome du côlon irritable, leur diagnostic peut être délicat.
Quelles sont les caractéristiques de ces deux maladies?
Lorsqu’une personne atteinte de la maladie cœliaque consomme des aliments contenant du gluten, son système immunitaire attaque des structures filiformes appelées « villosités », qui tapissent l’intestin grêle. (Ce type de « tir fratricide » fait de la maladie cœliaque une maladie auto-immune.) Cette réponse anormale au gluten n’est pas une réaction allergique, et la maladie cœliaque ne constitue pas une allergie au gluten ou au blé : les allergies concernent une autre branche du système immunitaire.
Avec le temps, ces attaques immunitaires peuvent « aplatir » les villosités, comme un champ d’herbe après une tempête de grêle. Des villosités saines, qui augmentent considérablement la surface de la paroi intestinale, sont responsables de l’absorption des nutriments dans la circulation sanguine. Par conséquent, la maladie cœliaque peut entraîner des carences en un large éventail de vitamines et de minéraux.
Bien que nous ne comprenions pas encore comment l’organisme réagit anormalement au gluten dans le cas d’une sensibilité au gluten non cœliaque (SGNC), certaines données probantes indiquent que le système immunitaire pourrait également être en jeu(1).
Cela dit, il est également possible que ni le système immunitaire ni le gluten lui-même ne soient toujours en cause lors de symptômes de la SGNC. Dans la plupart des études portant sur la SGNC, les participants consomment des céréales contenant du gluten plutôt que du gluten pur, ce qui signifie que ces personnes pourraient réagir à un autre composant du blé, de l’orge et du seigle(2).
Le principal suspect? Une famille de glucides appelés « FODMAP ». Lorsqu’ils ne sont pas correctement décomposés, ces glucides peuvent fermenter sous l’action des bactéries intestinales, ce qui entraîne des problèmes tels que des douleurs abdominales. Il se peut donc que certaines personnes présentant des symptômes de la SGNC ne digèrent pas très bien les FODMAP(3).
Ce dont on est certain à propos de la sensibilité au gluten non cœliaque : elle n’endommage pas les villosités(4).
Qui cela touche-t-il?
Seules les personnes qui héritent d’un ou de deux gènes spécifiques peuvent développer la maladie cœliaque(5). Mais bien que ces deux gènes soient très courants, seul un infime pourcentage des personnes qui les possèdent finissent par développer la maladie cœliaque. Pourquoi? La maladie cœliaque est probablement causée par une combinaison de facteurs, génétiques et autres, comme l’exposition à certains virus, pesticides ou autres produits chimiques.
Néanmoins, la maladie cœliaque est l’une des maladies génétiques les plus courantes, touchant environ une personne sur 100(6). Les risques de développer la maladie cœliaque sont sans doute accrus en cas d’antécédents familiaux de cette maladie ou lorsque l’on souffre, ou des membres de sa famille sont atteints, d’autres troubles auto-immuns.
En ce qui concerne la SGNC, il est plus difficile de dire combien de personnes sont touchées, en partie parce qu’elle n’a pas encore été étudiée en profondeur. De plus, certaines estimations sont fondées sur le nombre de personnes qui ont reçu un diagnostic d’un professionnel de la santé, mais aussi sur le nombre de personnes qui disent éviter le gluten pour quelque raison que ce soit. (Et cela inclut cette idée populaire, mais erronée, selon laquelle consommer du gluten est en quelque sorte malsain pour les personnes qui ne sont pas atteintes de la maladie cœliaque ou de la SGNC.) Selon des recherches menées dans les pays occidentaux, la prévalence pourrait être comprise entre 0,6 % et 10,6 %(7).
Quels sont les symptômes de la maladie cœliaque et de la SGNC?
Étant donné que certains symptômes de la maladie cœliaque et de la SGNC se recoupent, les prestataires de soins de santé ne peuvent pas les distinguer sur la base seule de ces symptômes. (Il convient de noter que lorsque l’on est atteint de la maladie cœliaque ou de la SGNC, on peut présenter un ou plusieurs symptômes.)
La maladie cœliaque(8) et la SGNC peuvent toutes deux causer les symptômes suivants :
- Diarrhée (constante ou récurrente)
- Douleurs abdominales
- Constipation
- Fatigue
- Aphtes buccaux
- Éruption cutanée
Les adultes atteints de la maladie cœliaque peuvent également éprouver des difficultés liées à une absorption inadéquate des calories et de certains nutriments. Ces problèmes comprennent(8) :
- Perte de poids
- Anémie
- Ostéoporose
- Défauts de l’émail des dents
- Engourdissement ou sensations de picotement dans les mains ou les pieds
Outre les symptômes communs avec la maladie cœliaque, la SGNC peut provoquer :
- Ballonnements
- Nausées
- Reflux gastriques
- Sensation générale de malaise
- Maux de tête
- Douleurs articulaires
- Confusion
Comment la maladie cœliaque et la SGNC sont-elles diagnostiquées?
Une simple analyse de sang peut déterminer s’il est hautement probable que vous soyez atteint de la maladie cœliaque, ou non. Votre système immunitaire produit des protéines appelées anticorps lorsqu’il perçoit une « menace », telle qu’un virus. Les anticorps sont conçus pour s’adapter et se fixer à un « envahisseur » spécifique. Les personnes atteintes de la maladie cœliaque présentent des taux élevés de certains anticorps dans le sang, car leur système immunitaire a considéré à tort le gluten comme un « ennemi ».
Toutefois, la recherche d’anticorps n’est que la première étape du diagnostic de la maladie cœliaque. Le test déterminant consiste en une biopsie endoscopique(11). Au cours de cette procédure (qui s’effectue généralement sous sédation), on passe un tube fin de votre gorge à votre intestin grêle. Une minuscule caméra, que l’on fixe à l’extrémité du tube, permet au gastroentérologue d’examiner l’intérieur de l’intestin. Un autre petit outil fixé au tube servira à prélever un petit échantillon de la paroi intestinale qu’un pathologiste examinera par biopsie pour vérifier la présence de lésions et d’inflammation.
Il est important de savoir que les résultats de ces deux tests ne seront précis que si l’on consomme encore régulièrement des aliments contenant du gluten.
Malheureusement, la SGNC nécessite ce que l’on appelle un diagnostic d’exclusion. Cela signifie que votre équipe de soins de santé doit éliminer d’autres maladies présentant des symptômes similaires avant de conclure que vous êtes atteint de la SGNC. Pour cela, il faut notamment obtenir un résultat négatif à un test d’anticorps de la maladie cœliaque.
Comment la maladie cœliaque et la SGNC sont-elles traitées?
À l’heure actuelle, le meilleur – et le seul – traitement de la maladie cœliaque est un régime strict sans gluten. Même s’il s’avère très efficace, il ne constitue pas un remède et il ne vaut que si l’on continue à le suivre.
La bonne nouvelle, c’est qu’en continuant à éviter le gluten, non seulement vous améliorez vos symptômes, mais vous donnez à votre intestin grêle la possibilité de guérir et de reconstruire des villosités. Ce processus de réparation peut prendre de trois mois à deux ans, en fonction de facteurs tels que l’âge(12). Il faut également garder à l’esprit que de petites quantités de gluten peuvent causer des dommages sans nécessairement provoquer de symptômes.
Si vous êtes atteint de SGNC, vos symptômes devraient également s’améliorer par l’adoption d’un régime sans gluten.
Que dois-je savoir avant d’entreprendre un régime sans gluten?
Il y a deux choses que vous devriez faire d’abord, car il ne faut pas se lancer tout seul et sans réfléchir. En premier lieu, vous devriez attendre de recevoir un diagnostic officiel de la maladie cœliaque ou de la SGNC. (Et gardez à l’esprit que si vous suivez un régime sans gluten avant de passer les tests nécessaires au diagnostic, les résultats risquent d’être inexacts.)
Ensuite, consultez un diététiste spécialisé dans ces maladies.
Pourquoi? Tout d’abord, lorsque l’on supprime les céréales saines de son alimentation, il est parfois difficile de trouver dans d’autres sources un apport suffisant des nutriments qu’elles contiennent. Et bien qu’il n’y ait jamais eu autant de choix d’aliments préparés sans gluten que de nos jours, la plupart sont beaucoup moins riches en vitamines, minéraux et nutriments que leurs équivalents contenant du gluten(13). Les diététistes spécialisés en santé intestinale peuvent souvent vous recommander des recettes adaptées à vos goûts ou vous suggérer des moyens de préparer une version sans gluten de votre plat préféré.
En outre, le gluten se dissimule dans toutes sortes d’aliments que l’on ne soupçonne pas : de la sauce soya aux mélanges d’épices, en passant par les vinaigrettes, les viandes transformées, les cubes de bouillon et même certains médicaments et compléments alimentaires. Savoir ce qu’il faut rechercher sur les étiquettes des aliments est une compétence qui s’acquiert avec le temps, et les conseils d’un expert vous faciliteront la tâche.
Avec un peu d’aide, vous devriez être en mesure de suivre un régime qui ne manque pas de saveur et vous permettra de prévenir les symptômes et de maintenir votre santé à long terme.

Références :
- Celiac Disease Foundation (2020). Non-Celiac Gluten Sensitivity Shows Distinct Immune Response. Consulter à (en anglais seulement) : https://celiac.org/non-celiac-gluten-sensitivity-shows-distinct-immune-response/.
- Current Developments in Nutrition (2020). Non-Celiac Gluten Sensitivity and Irritable Bowel Disease: Looking for the Culprits. Consulter à (en anglais seulement) : https://academic.oup.com/cdn/article/4/12/nzaa176/6056497.
- Celiac Disease Foundation. FODMAPs and Celiac Disease. Consulté le 9 mai 2022 (en anglais seulement) : https://celiac.org/fodmaps-and-celiac-disease/.
- Association canadienne de la maladie cœliaque. Sensibilité au gluten non cœliaque : Comment la diagnostiquer et la différencier de la maladie cœliaque. Consulté le 9 mai 2022 : https://www.celiac.ca/fr/maladies-induites-par-le-gluten/sensibilite-au-gluten-non-coeliaque/.
- Medline Plus. Celiac Disease. Consulté le 9 mai 2022 (en anglais seulement) : https://medlineplus.gov/genetics/condition/celiac-disease/#causes.
- Association canadienne de la maladie cœliaque. Le dépistage et le diagnostic de la maladie cœliaque. Consulté le 9 mai 2022 : https://www.celiac.ca/fr/professionnels-de-la-sante/diagnostic/.
- Nature Scientific Reports (2020). Prevalence of Non-Celiac Gluten Sensitivity in Patients With Refractory Functional Dyspepsia: a Randomized Double-Blind Placebo Controlled Trial. Consulter à (en anglais seulement) : https://www.nature.com/articles/s41598-020-59532-z.
Cet article a été rendu possible grâce à une subvention éducative sans restriction de Sperri – le premier substitut de repas à base de plantes au Canada.
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